Le 6 février dernier, l’agence Bleublancrouge, membre du Collectif Humanise, lançait la nouvelle offensive publicitaire des Brasseurs du Nord, mieux connus sous leur marque Boréale, avec le slogan percutant « Je bois local, mon Donald ». Cette campagne a immédiatement trouvé un écho puissant auprès des Québécois. Au-delà du succès de cette première collaboration entre les deux entreprises, c’est aussi l’illustration du pouvoir d’un message conçu ici, avec des références et une sensibilité propres à notre culture, qui résonne authentiquement auprès de son public. Retour sur cette campagne qui rappelle l’importance de créer, produire et consommer local.

Une entrevue avec Sébastien Rivest, directeur de création exécutif chez Bleublancrouge.
Q : Avez-vous été surpris par le succès remporté par la campagne?
SR : On savait qu’on tenait quelque chose qui faisait réagir ceux à qui on le montrait. Mais de là à prévoir que la pub serait autant partagée, que 50 minutes après sa diffusion, on serait sur TVA Nouvelles et que le panneau allait être montré à Tout le monde en parle, ça, on ne pouvait pas le prévoir.
Q : Comment expliquez-vous ce succès?
SR : Clairement, il y a quelque chose dans ces cinq petits mots qui a résonné fort. À croire que ce « Je bois local, mon Donald » exprimait l’émotion des gens, au bon moment et dans la bonne tonalité. Est-ce la tournure un peu baveuse, la sonorité très queb, le fait qu’on s’adresse à l’agresseur ou un peu tout ça? Difficile à dire. Mais clairement, on a touché quelque chose pour que ce soit aussi contagieux. Puis, Boréale, une marque d’ici, était la bonne marque pour exprimer ce message. Ce n’était pas du tout un stretch, ça paraissait naturel avec leur personnalité.
Q : Le timing doit aussi y être pour quelque chose?
SR : On a été hyper réactifs et ça a clairement fait la différence. Avec tout ce qui se passait dans l’actualité, il fallait qu’une marque locale prenne position. On a eu l’idée, les clients Boréale ont embarqué et, en moins de 48 heures, on était sur le marché. Vendu le mardi, en marché le jeudi! Une exécution aussi rapide, ça demande une structure agile et une équipe qui fonce. Et le timing était parfait : notre message est arrivé pile au bon moment pour faire sourire les gens tout en marquant les esprits.
Q : Ça se planifie comment une campagne du genre?
SR : Ça ne se planifie pas. C’est le genre de situation où il faut se fier à l’instinct. Nous sentions qu’il y avait une opportunité en or de prendre la parole, voire de lancer un véritable mouvement. On sentait que le message avait ce petit je-ne-sais-quoi d’irrésistible. L’idée ne se limitait pas à un panneau, mais avait aussi des composantes en lieux de vente pour rappeler le message au moment de l’achat, du marchandisage – casquettes, t-shirts. C’était pas juste un flash créatif. C’était une idée d’affaires. L’intelligence artificielle ne serait pas arrivée avec quelque chose d’aussi senti!
Q : Le choix d’aller en affichage plutôt que d’y aller exclusivement avec les médias sociaux a-t-il été un facteur?
SR : Ça prenait un média qui allait offrir une grande visibilité et de l’impact rapidement. Je suis persuadé que la campagne n’aurait pas eu le même succès si on avait réduit le tout à une publication sur les médias sociaux. Le fait qu’on ait mis ce message sur un panneau physique, dans la vraie vie, a ajouté à l’audace. Au-delà de la prise de position, ça devenait un coup. Et c’est ce qui a attiré l’attention des médias.
Q : Pensez-vous que l’attitude de Donald Trump envers le Canada va changer la donne en publicité?
SR : On sort de plusieurs années où les budgets nationaux ont fondu. Tant au Québec qu’au Canada, on voyait de plus en plus de campagnes à peine adaptées. Soudainement, la menace des tarifs et, plus encore, celle d’une annexion économique du Canada par les États-Unis a été un électrochoc. Trump a réveillé une fierté nationale qui sommeillait depuis un bout. Il y a un réel mouvement de prise de conscience : les consommateurs sont de plus en plus attentifs à l’impact de leurs choix, cherchant à encourager l’achat local, à soutenir les marques qui investissent ici, qui font travailler des gens d’ici.
Économiquement, ça risque de brasser la donne quant aux marques les plus populaires sur notre marché. Il y a de belles opportunités pour les annonceurs d’ici parce que les consommateurs vont changer leurs habitudes. Et pour de bon.
Pour les annonceurs québécois et canadiens, c’est l’occasion de créer de la résonance émotionnelle et culturelle. Et qui de mieux placé que le talent d’ici pour bâtir ses nouveaux ponts entre les marques et le consommateur? L’opportunité est là : c’est le moment de s’affirmer, de miser sur notre créativité locale, « oui, mon Donald », et de bâtir des marques fortes, enracinées dans la culture et l’économie d’ici.
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